29.4.03

OPTIMISME à MOITIÉ
Depuis plusieurs mois, je suis très critique du président Bush et surtout de ses conseillers. Je ne compte pas me repéter sur les raisons. Or, je dois saluer les rares occasions où l'administration a raison.

Vendredi dernier, le président a agréé le projet de loi Clean Diamond Trading Act approuvé par les deux chambres du Congrès. Par la suite, les États-Unis entrent en concordance avec le procès Kimberly.

Ce procès vise à combattre le fléau des 'diamants de sang.' L'exportation de ces diamants alimente depuis longtemps plusieurs des pires conflits du monde. Notamment les guerres civiles sanguinaires en Angola et en Sierra Leone qui viennent toutes deux, espérons-le, de s'achever.

Que le trafic de diamants de sang entre les rebelles du RUF sierra-léonais et al-Qaeda d'Oussama ben Laden soit allegué n'a certainement pas nuit aux efforts des organisations non-gouvernmentales humanitaires pour convaincre le Congrès et le président de faire avancer ce projet de loi. Les Américains achètent presque 70 pour cent du diamant mondial, ce qui démontre particulièrement l'importance capitale de ce projet de loi.

Certains se souviendront de la promesse faite par le président lors son adresse sur l'État de l'Union. Celle concernant le financement de la lutte anti-SIDA en Afrique. Certains croyaient que c'était un effort cynique de distraire progressistes et modérés dans son discours avant de s'en prendre violemment à l'Irak.

Le président allait annoncer aujourd'hui son soutien pour un projet de $15 milliards pour combattre le SIDA/VIH à travers le monde. Or, le projet est devenu la cible de la droite encore plus conservatrice que lui (malheuresement, il y en a). L'extrême droite s'oppose aux programmes concernant la distribution des préservatifs et d'autres qu'ils croient contraires au Christianisme conservateur.

Espérons que le président estimera aussi bénéfique de dépenser plusieurs milliards de dollars pour combattre la pire maladie du monde que de dépenser plusieurs milliards de dollars pour combattre l'un des pires dictateurs du monde.

21.4.03

LE 'VIOL POLITIQUE' DES ÉTATS-UNIS
Le week-end dernier, j'écoutais une entrevue fascinante du service anglais de la BBC avec une députée britannique. En tant que Catholique et Démocrate libérale (la démocratie sociale avec un courant libértaire), la députée a parlé de la relation entre la religion et la politique.

Selon elle, les attentats du 11 septembre 2001 furent 'un viol politique' des États-Unis. Je n'ai jamais pu bien m'exprimer aux étrangers sur la profondeur des effets du 11/9/01 sur l'esprit américain. Sa phrase 'le viol politique' est la meilleure brève explication de l'impact psychologique des attentats.

C'était le choc et la honte. Pour la première fois, le géant américain connaissait des risques. Les Américains se sentaient toujours à l'abri de tout danger, innoculés de l'influence des puissances étrangères... du moins depuis la guerre de 1812 contre les Britanniques. Le sentiment de vulnerabilité nous est novateur et on y réagit par le seul moyen qu'on a maîtrisé: militairement. On ne joue pas bien ensemble. On ne fait pas bien la diplomatie. On fait bien la guerre. Les Américains se sentaient violés et puis on se fâche. Quelque soit la cible. Le fait que Saddam n'a rien à voir avec Oussam (celui qui nous a réellement 'violé') n'importe. On se sent d'avoir écarté celui qui auraient pu potenitellement nous violer d'ici 1 ou 5 ou 100 ans.

C'est pourquoi les Européens ne comprennent pas notre hyper-réaction. Des pays tels la G-B, la France et l'Espagne vit le terrorisme depuis les décennies. Ils n'envahissent pas des pays choisis par hasard.

Dans les années 90, une vague de terrorisme islamiste algérien a secoué la France. Lorsque les États-Unis a proposé l'invasion de l'Afghanistan, ils ont invoqué la clause de défense collective du chartre de l'OTAN. Mais dès que la France souffrait des attentants habituels, elle n'a jamais invoqué cette clause. Elle n'a jamais proposé une invasion pour imposer un 'changement de régime' à Alger. Selon la France, les attentants étaient des crimes et non un incident international.

La France a vu ces attentants comme du crime organisé violent. Les États-Unis ont vu le 11 septembre comme un 'viol politique.' Ceci commence à expliquer les voies divérgentes que les deux pays ont abordé ces problèmes (sans oublier que la guerre d'Algérie a sans doute eu un impact sur la mémoire collective française).

Il vaut la peine de noter qu'en dépit de ces différences, la France, si méprisée par certains Américains petits en esprit, a non seulement appuyé sans abiguïté notre invasion de l'Afghanistan, elle y a envoyé des troupes. Il est grand temps que nous Américains cessons de cracher sur nos amis. Faute de quoi on risquera de n'en avoir plus!

17.4.03

PENSÉES DU JOUR
Hier, mon père écoutait le téléjournal issu de la télévision d'État syrienne (rediffusé par la chaîne américaine CSPAN). Il a dit vouloir suivre "un autre point de vue." Son idée de s'informer est d'osciller entre un forme de propagande (télé de nouvelles américaine) à un autre, mais à chacun son goût. En tout cas, le reporter expliquait le désir du gouvernement syrien pour que l'occupation américaine prenne fin au plus vite et que la souverainité nationale irakienne fasse son retour aux Irakiens dans le plus bref délai. Ceci du pays qui mène une occupation effective du Liban voisin depuis un quart de siècle. Mais, les pays arabes (comme ces dictatures qui ne se soucient des abus de droits de l'homme que quand les victimes sont palestiniens) sont reconnus pour leur sens d'ironie.

***

Tony Blair devrait se mettre en garde.

En fin 2001, nous Américains, on remerciait nos alliés européens de leur solidarité à la veille des attentants du 11 septembre. Les Français disaient "Nous sommes tous Américains" et nous leur remerciions d'avoir été appuyé la civilisation contre le mal. Quelques mois plus tards, le consensus des Européens ont participé à l'invasion de l'Afghanistan contre al-Qaeda soutenu par les Talibans. Les soldats français et allemands ont été aux côtés des troupes américaines en Afghanistan. Les hommes français et allemands DEMEURENT en Afghanistan pour lutter contre les ennemis des États-Unis. Ils étaient à notre côté contre ceux qui s'avéraient une grave menace à la sécurité américaine. Nous leur avons dit merci.

Mais cela ne contentait pas le président Bush. Il a décidé de lancer sa croisade contre un dictateur sanguinaire, mais un qui ne menaçait aucunement les États-Unis. Même le président Bush lui-même n'a pas traité l'Irak de menace immédiate. Sauf que l'Irak risquait d'être une menace possible et hypothètique d'ici un an, cinq ans ou cent ans. Plusieurs pays dont la France et l'Allemagne s'indignaient contre cette aventure impériale. Ils étaient avec nous lorsqu'il s'agissait de notre sécurité mais contre nous lorsqu'il ne s'agissait pas de menance imminente. Ceux qui ont lutté si vailliamment avec nous en Afghanistan sont devenus vauriens et appaiseurs chez les néo-conservateurs américains. Je me demande combiens de soldats français et allemands ont donné leur vie pour ces ingrats.

Tony Blair était avec nous parce qu'il s'est fait convaincu que l'invasion de l'Irak aurait été un bonne idée. Les néo-conservateurs n'ont cessé de vanter les qualités du premier ministre britannique. Un grand homme, insisitaient-ils, un véritable homme d'État. Le Churchill du 21e siècle, selon eux.

Mais si Blair s'oppose à la prochaine aventure impériale de Bush? Vous pouvez vous assurer qu'il sera placé carrément du camp 'ingrat' avec Chirac et de Villepin. Il passera du Churchill du 21e siècle au Chamberlain.

Déjà, des tensions s'installent au sein de l'alliance américo-britannique. Blair, l'internationaliste, insiste sur un rôle central à l'ONU dans la reconstruction de l'Irak. Il comprend que ce rôle confierait une legitimité à l'intervention et contrerait les accusations faite par ceux, y compris moi, que l'invasion était une aventure impériale dont la fin était la conquête économique du pays et de la région.

Mais Tony Blair devrait se mettre en garde. Il est le chou-chou des faucons à Washington aujourd'hui, mais cela risque de changer du jour au lendemain. Ce changement est presque certain.

15.4.03

LE MOINDRE DE DEUX DIABLES DEMEURE UN DIABLE
J'ai lu un article de l'Associated Press sur l'aide apportée par les Américains au programme nucléaire irakien. "J'ai trouvé un beau cadeau à la bibliothèque donné par l'Agènce américaine pour l'Énergie nuclaire -- le rapport du projet Manhattan," a dit Khidhhir Hamza, un scientifique nucléaire qui a rejoint les États-Unis en 1994.

Malheuresement, cela ne m'étonne pas. Les États-Unis a une histoire sordide de soutenir des dictateurs odieux pour que ce soutien finisse par tourner au vinaigre. Deux scénarios sont à la mode.

L'un est qu'on appuie aveuglement un régime si déspotique qu'il provoque des conditions révolutionnaire et finit par se faire renverser. Le nouveau régime nous est nettement plus hostile que l'ancien. Castro à Cuba. Khomeni en Iran. Les Sandanistes au Nicaragua. L'on peut dire même Hugo Chavez au Venezuela.

L'autre scénario est de s'enchaîner au principe "L'ennemi de mon ennemi est mon ami."

Par cause de cette adhérence irréflichie, les États-Unis ont appuyé les Mujahadeen en Afghanistan contre les Soviétiques... les mêmes qui sont devnus les Talibans. On a donné un coup de main à Saddam Hussein contre la montée islamiste venue d'Iran voisin. On a soutenu Manuel Noriega au Panama. Cette appui n'était pas passif. Les Américain ont fournir des renseignements sur le nucléaire à Saddam. On l'a fortement armé. Beaucoup de monde a vu la photo notorieuse des années de la serrée de main entre un souriant Donald Rumsfeld (actuel secrétaire américain à la Guerre) et Saddam. Noriega a reçu une formation militaire à l'École des Amériques (surnommé l'École des tortionnaires pour ses diplômés infâmes), une institution gérée par la CIA. Comme vous le savez, les Américains ont finit par envahir tous ces pays et renverser tous ces régimes.

On s'est aperçu trop tard que le moindre de deux diables reste un diable. Or, c'est un leçon qu'on refuse d'apprendre. On s'éloigne de pays civilisés tels que l'Allemagne et la France pour fraterniser avec une dictature comme l'Arabie saoudite.

Combien de monstres de Frankenstein va-t-on créer avant qu'on n'apprene la bonne voie? Ceux qui abusent des droits de l'homme ne sont pas capable d'être partenaires fiables. On ne peut pas faire confiance à ceux qui méprisent la liberté chez eux pour propager la liberté à l'étranger.

Le moindre de deux diables demeure un diable.

13.4.03

NE PAS VOUS LAISSER EMPORTER PAR LA TESTOSTERONE
En écoutant la télé ce matin, le canal Histoire avait un débat où plusieurs historiens prédisaient ce que de futurs historiens diront sur l'invasion de l'Irak. C'est bizarre de voir un 'débat' prédisant ce que les gens du futur diront du passé, ce qui est le présent. :-)

Mais c'était intéressant. L'un a dit que ça dépendrait du point de vue. Un futur historien américain verra des choses d'un autre oeil qu'un futur historien arabe.

Or, un autre a suggéré que la conquête/libération de l'Irak marquerait "l'une des grandes triomphes de l'histoire américaine." A notre quotidien local, une commentatrice a dit que "les gauchistes acceptent mal la libération" de Bagdad.

Ce genre de triomphalisme américain démontre pourquoi on est SI bien aimés autour du monde. Pourquoi les autres ne voient-ils pas que nous Américains, on mène une croisade juste pour libérer ce misérable peuple de leur tyrannie? Notre comportement n'est rien d'autre que brut. L'idée de l'humilité nous est étrangère. On est grands, dit-on, et les autres sont des vauriens. Pourquoi ne pas le dire?

C'est bon d'être fier de son pays. Mais la fierté poussée à l'extrême est dangereuse. Hitler a rendu les Allemands fiers. Saddam a appellé à la fierté irakienne. En fait, presque tous les dictateurs se servent de la fierté nationale pour parvenir à leurs fins néfastes. La fierté puis la chute, disent les anglophones. L'un des sept péchés mortels. Les États-Unis ne font rien é en modération, encore moins la fierté

Je veux rendre les choses claires. D'une perspective militaire, l'invasion de l'Irak était rapide et assez efficace avec un minime de morts et blessures (civiles et militaires) par rapport aux autres conflits. Mais de la traiter de "l'une des grandes triomphes de l'histoire américaines," c'est peu crédule!

On a reversé un régime isolé et impopulaire. On a battu une armée de troisième classe appauvrie par une décennie de sanctions et de bombardements regulières. On l'a fait avec, de loin, le militaire le puissant du monde... un militaire mieux financé que les 15 prochains militaires nationaux du monde réunis.

C'est un écrasement. C'était Zizou, Henry et le onze national de France contre une équipe des moins de 12 ans. Une victoire, certes, mais des plus glorieuses?

Le militaire américain a fait son travail. Et si vous êtes pro-guerre, vous pourriez en être heureux. Dire "bon travail." Mais de la traiter de l'une des grandes triomphes de l'histoire américaine, c'est une farce. Je doute fort que les histoirens du futur mentionneront la chute de Bagdad au même temps que, disons, le débarquement en Normandie.

Il reste une guerre pour conquérir l'esprit des modérés et indécis du monde arabe. Chaque geste triomphaliste ne bénéfice que ceux qui veulent nous haïr. Chaque acte triomphaliste rend plus difficile la cause de nos amis de la région.

Si vous êtes parmi ceux dont la chute de Bagdad donne raison à votre position (elle ne discrédite pas la mienne), je vous prie de ne pas vous laisser emporter par la testostérone! Pour le bien de tous, y compris vous et moi.

10.4.03

COALITION DES VOLONTIERS CONTRE LES DIAMANTS DE SANG
Hier, j'ai regardé un documentaire sur les diamants de sang. C'est une question que je suis depuis quelques temps mais les images demeurent puissantes.

Pour ceux qui ne le savent pas, dans tant de pays, des groups rebelles se servent du trafic illicite de diamants pour financer leur rebellion. Par la suite, des organisations non-gouvernmentales (ONG) les surnomment "diamants de sang" ou "diamants de conflit." Ils souhaitent que cette stigmatisation fasse pression sur l'industrie du diamant pour qu'elle établise de une réglementation afin de contrer ce traffic. La République démocratique du Congo, le Liberia et l'Angola sont trois pays frappés par ce fléau. Mais les effets des diamants de sang torturent, plus que tout autre pays, la Sierra Leone, en Afrique occidentale.

Je m'yintéresse pour deux raisons. La Sierra Leone entretient des liens étroits avec et est voisine de la Guinée, un pays que j'ai habité durant deux ans. La stabilité de la Sierra Leone touche de près la stabilité de la Guinée. De plus, j'ai plusieurs amis sierra-léonais qui ont dû fuir leur pays déchiré par une guerre civile des plus cruelles tout le long des années 90.

Durant la fin des années 90 et le début du nouveau siècle, plusieurs ONG ont oeuvré pour faire la lumière sur le trafic des diamants de sang. Ces efforts ont réussi à ouvrir une dialogue avec l'industrie du diamant sur la réglementation, ce qui se fera appeler le procès Kimberly. Ce procès établit une certification standardisée dans le monde du diamant. Les pays exportateurs doivent assurer que tous les diamants quittant le pays (de façon légale) ne sont pas le fruit de conflit. Crucialement, les pays importateurs ne doivent permette que des diamants certifiés à entrer dans leurs marchés.

Plusieurs ONG, dont Friends of Sierra Leone, ont fait du lobbying afin de persuader le Congrès américain à adopter le projet de loi Clean Diamonds Trade Act pour faire entrer les États-Unis en accord avec le procès Kimberly. Friends of Guinea, une ONG dont je suis membre, a fait partie de ces efforts d'une façon très secondaire. On peut dire qu'on faisait partie de la "coalition des volontiers" contre les diamants de sang.

Je suis heureux de dire que le travail formidable de ces ONG a fait que la Chambre des répresentants vient d'approuver (par 419 voix contre 2) le Clean Diamonds Trade Act. Le Sénat devrait considérer un projet de loi semblable sous peu. Je ne sais pas si le président Bush entend agréer ce projet mais je ne vois pas pourquoi il s'y serait opposé. Le fait qu'al-Qaeda aurait été lié avec le trafic de diamants de sang en Sierra Leone devrait lui convaincre.

Cette loi (ni le procès Kimberly) ne mettrait pas une fin définitive aux tragédies alimentées par les diamants de sang. Mais avec la moitié des bijoux de diamants étant achetée aux seuls États-Unis, le Clean Diamonds Trading Act sera un important pas en avant pour stopper ce fléau.


En savoir plus
Global Witness: une ONG britannique qui fait la lumière sur les liens entre les abus des droits de l'homme et les ressources naturelles, notamment le pétrole, les diamants et le bois d'oeuvre. [NB: la plupart des dossiers sont en anglais]

Article du Monde diplomatique sur la guerre et les diamants en Sierra Leone.

Urgence humanitaire, une ONG française.

La situation en Sierra Leone vue par La Croix rouge

7.4.03

LE SADDAM OUEST-AFRICAIN

Une partie des missions de ce blog est d'informer les gens sur ce qui se passe dans les régions ignorées par les médias nord-américaines et européennes. Des pays hors des sentiers battus, l'on peut dire. On ne peut s'indigner d'un fait dont on ignore l'existence.

Ci-bas, je présente un rapport sur les activités déstabilisatrices du seigneur de guerre et dictateur libérien Charles Taylor émis par l'ONG (organisation non-gouvernementale) britannique Global Witness.

Ce sujet m'est sensible car l'un des pays que Taylor vise à déstabiliser est la République de Guinée, un pays que j'ai habité deux ans en tant que volontaire du Corps de la Paix américain. J'y ai vécu pendant la période la plus terrible de la guerre civile libérienne, une guerre où la plupart des pires actrocités furent commises par les hommes (et souvent les garçons) de Taylor. Il a déjà apporté un soutien indéfatiguable aux rebelles du Front révolutionnaire uni qui ont détruit la Sierra Leone. Il est accusé d'appuyer les rebelles qui occupent une bonne partie de la Côte d'Ivoire. Il a déjà déstabilisé deux des trois voisins du Liberia. Il n'est reste que la Guinée.

Espérons que la Haye trouve une place dans la cellule de Milosevic pour hébérger Taylor.

Source: Global Witness


Comment le trafic d’armes et les activités mercenaires en Afrique occidentale sont soutenus par le gouvernement libérien et par des entreprises d’exploitation forestière
31/03/2003

Un nouveau rapport de Global Witness paraissant aujourd’hui dénonce la façon dont le gouvernement libérien tend à déstabiliser violemment l’Afrique occidentale, par le biais de son soutien aux mercenaires de Côte d’Ivoire et de Sierra Leone et du fait de ses importations régulières d’armes, qui constituent une violation du régime de sanctions imposé par les Nations unies. Le rapport, intitulé ‘The Usual Suspects: Liberia’s Weapons and Mercenaries in Cote d’Ivoire and Sierra Leone’, dresse un bilan du danger que représente le Liberia pour la sécurité et la paix au niveau international. Il montre comment le gouvernement libérien soutient les fractions rebelles du MPIGO1 et du MJP2 en Côte d’Ivoire, et comment il a l’intention d’utiliser des mercenaires pour déstabiliser la Sierra Leone. Global Witness en appelle au Conseil de sécurité des Nations unies pour qu’il fasse passer, rapidement et sans hésitation, une nouvelle résolution reconnaissant le danger que représente le Liberia pour la sécurité internationale, pour qu’il renouvelle l’actuel régime de sanctions, et pour qu’il étende ces sanctions à l’industrie de bois d’œuvre du Liberia, car celle-ci continue d’être pour le gouvernement libérien la principale source d’accès financier et logistique aux marchés d’armes internationaux et aux mercenaires.

« Nous avons découvert des informations que montrent que le gouvernement libérien est toujours impliqué à ce jour dans le commerce illégal d’armes, qu’il est derrière l’entraînement, l’armement et le déploiement des fractions rebelles ivoiriennes du MPIGO et du MJP, et que c’est le président du Liberia, Charles Taylor, qui mène le jeu depuis Monrovia », explique Alice Blondel, chargée de mission à Global Witness. « Parmi les ‘suspects’ dont il est question dans notre rapport, il y a le Président Charles Taylor ainsi que l’ancien chef du RUF Sam Bockarie, alias ‘le général Mosquito’. Ils ont tous deux participé par le passé aux troubles régionaux, ils sont maintenant impliqués dans la grave crise que traverse la Côte d’Ivoire, et ils ont l’intention d’ébranler la paix déjà bien fragile en Sierra Leone. »

Le nouveau rapport fait état des individus, des entreprises et des groupes armés qui soutiennent les activités du gouvernement libérien dans la région. Il donne également des dates, des emplacements, ainsi que des détails sur la logistique des importations illégales d’armes par le Liberia et sur les mouvements des forces mercenaires. Voici quelques-unes des principales découvertes de Global Witness :
· Les armes continuent à arriver régulièrement au Liberia. En effet, toutes les deux ou trois semaines, le Liberia reçoit des cargaisons d’armes en provenance d’Europe de l’Est, lesquelles ont généralement transité par le Nigeria et la Libye. La majorité des cargaisons arrivent par mer dans les ports de Buchanan et de Harper, qui sont respectivement contrôlés par l’OTC (Oriental Timber Company) et par les MWPI (Maryland Wood Processing Industries). Le rapport souligne à quel point les importations libériennes d’armes dépendent de l’industrie d’exploitation forestière, qu’il s’agisse du courtage et du financement des marchés d’arme ou du déchargement et du transbordement des armes au moment de leur arrivée au Liberia.
· C’est le gouvernement libérien qui a créé et qui contrôle aujourd’hui les fractions rebelles du MPIGO et du MJP en Côte d’Ivoire. Ces fractions sont composées en majorité de mercenaires libériens et sierra-léonais. Les groupes de combattants, qui ont été organisés au Liberia avant leur déploiement en Côte d’Ivoire, sont aujourd’hui dirigés par des proches collaborateurs du président Charles Taylor.
· Le gouvernement libérien est actuellement en train de mettre en œuvre une stratégie de déstabilisation en Sierra Leone, qui a pour but de perturber les activités de la Cour Spéciale, devant laquelle le président Charles Taylor ainsi que d’autres personnalités importantes du Liberia devraient être mis en examen pour leurs crimes de guerre commis lors de la période de guerre civile en Sierra Leone.
· L’industrie libérienne du bois continue à fournir au gouvernement libérien les moyens nécessaires au maintien de son ravitaillement en armes illégales et en forces de combat. Les MWPI, qui contrôlent les importations d’armes, stockent également des armes dans leur bureau central situé à Harper, ceci afin que le gouvernement libérien soit ensuite en mesure de les envoyer dans son camp de brousse situé à la frontière ivoirienne, où elles seront utilisées par les forces du MPIGO et du MJP. Quant à l’OTC, elle continue d’organiser des cargaisons d’armes, et a mis en place une milice de 2500 soldats qu’elle tient à la disposition du gouvernement libérien.
· Les fonds détournés par le président Charles Taylor sont dissimulés dans des banques suisses ou burkinabaises. Charles Taylor possède au moins un compte au Burkina Faso établi sous son nom d’emprunt, Jean-Pierre Somé. Les capitaux libériens déposés dans des banques suisses sont d’un montant supérieur à ceux du Nigeria ou de l’Afrique du Sud, et s’élèvent au moins à 3,8 milliards de dollars3.

Par le passé, les Nations unies ont reconnu le danger que représentent les fonds détournés du bois4 et elles ont fait le lien entre des entreprises d’exploitation forestière, les importations d’armes illégales et le soutien apporté aux fractions rebelles5. Malgré cela, le Conseil de sécurité n’a toujours pas pris d’action décisive ni de sanctions à l’encontre de l’industrie libérienne du bois. « A l’heure actuelle, au Liberia, il est impossible de séparer l’industrie d’exploitation forestière libérienne des réseaux internationaux de trafiquants d’armes illégales et de mercenaires. A moins que l’on n’empêche au gouvernement libérien d’avoir accès à ces ressources, l’instabilité, qui est provoquée en Côte d’Ivoire par le trafic d’armes et les mercenaires soutenus par les Libériens, continuera. Il se peut alors que la menace d’activités mercenaires libériennes en Sierra Leone devienne une réalité, et que cela remette en question toute chance de paix dans cette région à l’avenir. »

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Notes :
1 Mouvement Populaire Ivoirien du Grand Ouest.
2 Mouvement pour la Justice et la Paix.
3 Extrait d’un document intitulé ‘Where has all your money gone? A fact sheet on Swiss banks and tax evasion’, Déclaration de Berne, 26 juin 2002.
4 Résolution 1408 (2002) adoptée le 6 mai 2002 par le Conseil de sécurité lors de sa 4526ème réunion
5 Paragraphe 19 du rapport remis par le Panel des Experts nommé suite à la résolution 1306 (2000) prise par le Conseil de sécurité, à l’égard de la Sierra Leone (Décembre 2000).

Voir également les rapports précédents rédigés par Global Witness au sujet du Liberia, intitulés : ‘Logging Off: How the Liberian Timber Industry Fuels Liberia’s Humanitarian Disaster and Threatens Sierra Leone’ (Septembre 2002); et ‘Taylor-made: The Pivotal Role of Liberia’s Forests and Flag of Convenience in Regional Conflict’ (Septembre 2001).

Pour toute question, veuillez contacter Alice Blondel au +44 (0)7968-160-377

DIX SECONDES POUR UN ACCORD DE PAIX
Ce n'est pas que les médias américains qui ignorent l'actu des régions moins connues. La semaine passée, les factions de la guerre "civile" (et continentale) en République démocratique du Congo [RDC] ont signé un accord en Afrique du Sud. Cet accord prévoyait un gouvernement de l'union nationale, de futures élections et, bien entendu, une fin aux hostilités.

Selon le quotidien La Libre Belgique, "Quelques secondes ont suffi à la RTBF [télévision d'État belge] pour commenter l'accord signé le 1er avril à Sun City en Afrique du Sud entre le gouvernement Kabila et les factions rebelles. Un propos laconique. En guise d'images, une carte de la région. Est-ce à dire que l'événement ne valait pas le déplacement de journalistes ou une analyse a posteriori. Même si les armes se font toujours entendre à l'Est du Congo, dans la province de l'Ituri, cet accord est d'une portée symbolique forte pour les populations qui n'ont cessé de payer un lourd tribut aux différents seigneurs de guerre dans cette région d'Afrique centrale."
On se garde d'être sceptique envers cet énimème accord dit de paix. Cependant, cet épisode démontre bien la puissance des images. Quasi-impossible d'envoyer des journalistes et de l'équipment télévisuel à la jungle distante et isolée de l'Est congolais. Facile d'envoyer des journalistes où que soient deployés les troupes occidentaux. Les publics européens et nord-américains sont donc bien informés des problèmes de l'Irak ou du Kosovo ou de la Bosnie, mais presque pas du tout sur les 2 millions de morts en RDC attribuées (directement ou indirectement) à la guerre depuis le début de ce conflit il y a 5 ans.
On dit que le public occidental ne s'intéresse guère aux actu internationales tant que leurs siens n'y sont pas impliqués. Comment le public peut-il s'intéresser ou se désintéresser à une nouvelle qu'il ne sait même pas est train de sévir toute une région? Impossible de s'indigner d'un fait dont on est informé!

Le texte intégral de l'article se retrouve ici.

EN SOUVENIR DU RWANDA
Le 7 avril marque le 9e anniversaire des début du génocide rwandais de 1994. On estime qu'entre 800.000 et 1 million de personnes ont été tuées dans des massacres ayant duré une centaine de jours. Beaucoup d'États, notamment les pays voisins, ont fait pression pour qu'une intervention internationale arrête les tueries (telle que prévue par le traité anti-génocide). Mais, une éventuelle intervention fut bloquée par la France, la Belgique et les États-Unis, chacun ayant ses propres raisons.

Ceci bien que tous d'entre eux aient signé le traité anti-génocide. Ceci bien que c'était les pays est-africains eux-mêmes qui allaient fournir leurs soldats pour assurer l'intervention. Ils ne voulaient que PRETER les équipments du militaire américain, ce que Washington refusa). La France a géré la seule intervention dont le but primaire (et caché) fut de permettre aux génocidaires (menacés par une rebellion) de prendre le refuge en ex-Zaïre. Le régime génocidaire entretenaient des liens amicaux avec la France et fut l'un des États-clients de l'Hexagone.

Le génocide s'est déroulé moins d'un an après l'ouverutre du musée mémorial de la Shoah à Washington. Une cérémonie où tous les intervenants, y compris le président d'alors Bill Clinton, n'ont cessé de répéter 'jamais plus ça.'